Demandes de renseignements présentées par des parties privées dans le cadre d’actions en recouvrement de dommages‑intérêts

Bulletin

Version préliminaire pour consultations publiques — Le 8 mars 2017

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Dans cette publication, la forme masculine désigne tant les femmes que les hommes.

Also available in English under the title Information requests from private parties in proceedings for recovery of loss or damages.

I. Introduction

Aux termes de l’article 36 de la Loi sur la concurrence (la « Loi »), une partie privée peut engager des procédures afin de recouvrer le montant de la perte ou des dommages subis par suite d’un comportement allant à l’encontre d’une disposition de la partie VI de la Loi ou du défaut d’une personne d’obtempérer à une ordonnance rendue par le Tribunal de la concurrence ou un autre tribunal en vertu de la LoiFootnote 1. L’article 36 vise à favoriser la capacité qu’ont les victimes de recouvrer le montant de la perte ou des dommages qu’elles ont subis par suite d’un comportement anticoncurrentiel. Le Bureau de la concurrence (le « Bureau ») considère les actions privées intentées en vertu de l’article 36 de la Loi comme un mécanisme d’exécution additionnel et important, qui est distinct et indépendant de son rôle d’application et de contrôle d’application de la Loi. En effet, l’article 36 sert non seulement les intérêts privés des consommateurs pour ce qui est de recouvrer les pertes qu’ils ont subies et d’obtenir des dommages‑intérêts, mais aussi l’intérêt public plus général que constitue la dissuasion.

Les personnes qui envisagent d’intenter une action fondée sur l’article 36, ou qui sont parties à une telle action, peuvent croire que le Bureau détient des renseignements pertinents à cette fin. À cet égard, le Bureau a reçu des demandes visant à obtenir ce genre de renseignements, surtout de la part de parties privées engagées dans des recours collectifs au Canada. Le présent bulletin donne les grandes lignes de la position générale du Bureau quant à l’application et au contrôle d’application de la loi à l’égard des demandes d’accès à des renseignements se trouvant en sa possession ou sous son contrôle, demandes qui sont présentées par des personnes qui envisagent de participer ou qui participent à une action fondée sur l’article 36 de la LoiFootnote 2. Le présent bulletin expose également le fondement général de la position du Bureau. Il complète la section « Actions privées en dommages et intérêts » du bulletin d’information du Bureau intitulé « Communication de renseignements confidentiels aux termes de la Loi sur la concurrence »Footnote 3.

II. Position générale du Bureau

Afin de protéger l’intégrité de son processus d’enquête et la confidentialité des informations qu’il détient, la position généralement adoptée par le Bureau consiste à ne pas fournir volontairement des renseignements aux personnes qui envisagent d’engager une action de nature privée visée à l’article 36 de la Loi ou qui y sont engagées. Comme cela est expliqué en plus grand détail dans le présent bulletin, le Bureau s’appuie largement sur des renseignements communiqués sur une base volontaire. Cela étant, la capacité du Bureau d’assurer l’application et le contrôle d’application de la Loi serait sérieusement compromise s’il n’était pas en mesure de donner aux fournisseurs de renseignements une garantie de confidentialité à l’égard de ces renseignements et d’obtenir la collaboration de ces personnes. En conséquence, si une assignation lui est signifiée, le Bureau en informera le fournisseur de renseignements et s’opposera aux assignations concernant la production de renseignements si le fait de s’y conformer pourrait nuire à un interrogatoire, une enquête ou une procédure de contrôle d’application de la Loi en cours ou nuire d’une autre façon à l’application ou au contrôle d’application de la Loi. Si son opposition échoue, le Bureau sollicitera une ordonnance judiciaire de protection en vue de préserver la confidentialité des renseignements en questionFootnote 4-Footnote 5.

La position générale du Bureau est importante, en ce qu’elle vise à empêcher qu’un interrogatoire, une enquête ou une procédure de contrôle d’application de la Loi en cours ne soit entravé, et à maintenir la confidentialité des renseignements reçus par le Bureau en application de la Loi, ainsi qu’on l’expose plus en détail ci‑dessous.

III. Empêcher les obstacles aux interrogatoires, enquêtes ou procédures de contrôle d’application de la Loi en cours

La production de renseignements qui se trouvent en la possession du Bureau ou sous son contrôle cependant qu’un interrogatoire, une enquête ou une procédure de contrôle d’application de la Loi sont réalisés en vertu de celle‑ci pourrait potentiellement entraver cet interrogatoire, cette enquête ou cette procédure. Par conséquent, cette production porterait atteinte à la capacité du Bureau d’appliquer la Loi ou d’assurer le contrôle de son application.

IV. L’importance de la confidentialité pour le rôle d’application ou du contrôle d’application de la Loi du Bureau

La confidentialité est un principe directeur de l’approche du Bureau en ce qui concerne le contrôle et l’application de la Loi. Ce principe demeure important, que les demandes de renseignements visent des interrogatoires, enquêtes ou procédures de contrôle d’application de la Loi qui sont en cours ou terminés.

Le Bureau est tenu par la Loi de conduire ses enquêtes en privé et de préserver la confidentialité des renseignements qu’il obtient en application de la LoiFootnote 6. Outre ses obligations légales, la capacité du Bureau d’assurer l’application et le contrôle d’application de la Loi est influencée par sa capacité de protéger la confidentialité des renseignements qu’il reçoit. Cet aspect important comporte les deux dimensions qui suivent.

En premier lieu, le commissaire et les employés du Bureau ont besoin d’une multitude d’informations provenant d’une variété de sources afin que les interrogatoires, enquêtes ou procédures de contrôle d’application de la Loi puissent être menés efficacement. Le Bureau se fonde dans une grande mesure sur des renseignements communiqués volontairement, qui sont souvent confidentiels ou de nature exclusive ou délicate sur le plan commercial. La capacité du Bureau à donner aux personnes fournissant volontairement des renseignements une assurance de confidentialité conformément à la Loi rend ces personnes plus disposées à collaborer avec le Bureau et à lui fournir les renseignements dont il a besoin pour pouvoir s’acquitter efficacement de son mandatFootnote 7.

Qui plus est, les dénonciateurs, demandeurs d’immunité et de clémence et autres informateurs confidentiels et participants dans le marché sont souvent réticents à coopérer aux enquêtes du Bureau par crainte de représailles, notamment de la part des sujets des enquêtes du Bureau. Dès lors, la capacité de celui‑ci à mener correctement ses enquêtes serait sérieusement compromise s’il ne pouvait fournir aux intéressés une garantie de confidentialité à l’égard des renseignements obtenus, de même qu’en ce qui a trait à leur collaboration avec le BureauFootnote 8.

En second lieu, comme souligné précédemment, les renseignements communiqués au Bureau sont souvent confidentiels ou de nature exclusive ou délicate sur le plan commercial. La divulgation de tels renseignements, en particulier dans le cas où des concurrents du fournisseur de renseignements peuvent y accéder, va à l’encontre des objectifs de la Loi et contrecarre son objet, qui consiste à favoriser la concurrence et à protéger les consommateurs.

V. Privilège de l’intérêt public

Le Bureau invoquera les privilèges applicables, dont le privilège de l’intérêt public, afin de protéger les renseignements en sa possession ou sous son contrôle contre la divulgation.

Le privilège de l’intérêt public fait obstacle à la communication de renseignements qui sont en la possession du gouvernement lorsque cette communication est contraire à l’intérêt publicFootnote 9. Ce privilège a eu dans le contexte de la Loi une évolution qui lui est propre et son existence est bien établieFootnote 10. Ainsi, un privilège générique fondé sur l’intérêt public s’applique aux renseignements que le Bureau recueille ou crée dans le cadre d’un interrogatoire, d’une enquête ou d’une procédure de contrôle d’application de la LoiFootnote 11.

Le privilège générique fait naître une présomption à première vue d’inadmissibilité applicable à une catégorie de documents (ces documents ne sont donc pas assujettis à la communication), vu qu’il existe des raisons de principe prépondérantes de les soustraire à la communicationFootnote 12. Comme nous l’avons vu ci-dessus, l’intérêt public commande d’assurer la confidentialité des renseignements recueillis ou créés par le Bureau dans le cadre d’un interrogatoire, d’une enquête ou d’une procédure de contrôle d’application de la LoiFootnote 13. Par conséquent, la personne qui cherche à faire échec au privilège générique doit s’acquitter d’un lourd fardeauFootnote 14. Dans le contexte de la Loi, elle devra démontrer l’existence de [TRADUCTION] « circonstances impérieuses » ou d’un « droit concurrent impérieux », par exemple le fait pour une partie défenderesse de voir réduite sa capacité de réfuter la preuve et les allégations avancées contre elle, même s’il serait [TRADUCTION] « difficile d’imaginer une situation » semblableFootnote 15.

Le privilège de l’intérêt public s’applique aux renseignements recueillis par le Bureau dans le cadre d’un interrogatoire ou d’une enquête relativement à une procédure de contrôle d’application prévue dans la Loi ou à des recours privés visés à l’article 36 de la LoiFootnote 16. En d’autres termes, il n’y a aucune distinction de principe dans l’application du privilège d’intérêt public entre une procédure de contrôle d’application prévue dans la Loi et un recours privé visé à l’article 36 de la LoiFootnote 17.

Le Bureau reconnaît que le paragraphe 29(1) de la Loi comporte une exception à la règle de non‑communication des renseignements qui sont en la possession du Bureau ou sous son contrôle lorsque la communication a lieu dans le cadre de l’application ou du contrôle d’application de la Loi, et que la procédure intentée en vertu de l’article 36 de la Loi relève de cette exceptionFootnote 18. Toutefois, le Bureau estime que cette exception ne restreint pas la portée de l’application du privilège de l’intérêt public aux renseignements qui sont en la possession du Bureau ou sous son contrôle, et n’a aucune autre incidence sur cette application. Il est de jurisprudence constante que ni l’article 29 ni l’article 36 de la Loi ne permettent d’ordonner au Bureau de communiquer les renseignements qui sont en sa possession ou sous son contrôleFootnote 19. Les particuliers qui intentent les poursuites visées au paragraphe 36 de la Loi, malgré le fait qu’ils exercent des recours privés pour faire appliquer la Loi, ne sont pas dans la même situation que celle du commissaire : ils ne sont donc pas fondés à obtenir les mêmes renseignements que ceux qui sont en la possession ou sous le contrôle du BureauFootnote 20.

VI. Coûts financiers et coûts de renonciation du Bureau

Le Bureau estime que les coûts financiers et coûts de renonciation qu’entraîne sa réponse à une demande de renseignements devraient être pris en compte par quiconque demande les renseignements au Bureau et par les tribunaux appelés à se prononcer sur ces demandes.

La quantité de renseignements demandés au Bureau, particulièrement de la part des parties à un recours collectif intenté en vertu de l’article 36 de la Loi, est normalement très abondante. La réponse à de telles demandes est chronophage et représente des coûts importants pour le Bureau. L’importance de ces coûts se mesure par les coûts financiers et les coûts en capital humain qui sont nécessaires pour répondre à la demande de renseignements et se rattache non seulement aux coûts directs, mais aussi aux coûts de renonciationFootnote 21. Le repérage, l’examen, la classification et, au besoin, le caviardage de documents peuvent nécessiter beaucoup de temps. Même si le salaire et les coûts indirects sont remboursés, les employés et les avocats du Bureau ne sont alors pas en mesure de remplir la mission d’intérêt public du Bureau. Le Bureau estime que cette situation serait contraire à l’intérêt public.

VII. Conclusion

Le Bureau reconnaît que l’exercice des recours privés intentés en vertu de l’article 36 de la Loi est important et qu’il s’agit d’un outil qui permet aux victimes de comportements anticoncurrentiels de recouvrer les pertes qu’elles ont subies et d’obtenir des dommages-intérêts. Cependant, le Bureau estime que pour assurer l’application et le contrôle d’application de la Loi et pour protéger l’intégrité de son processus d’enquête et la nature confidentielle des renseignements qui sont en sa possession, il ne fournira pas volontairement des renseignements aux personnes qui envisagent d’intenter une procédure visée à l’article 36 ou aux parties à une telle procédure.

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