Commentaires du Bureau de la concurrence au Comité consultatif sur le système bancaire ouvert

Favoriser un système bancaire ouvert, concurrentiel et innovant au Canada

Le 18 janvier 2021

Sur cette page :

  1. Introduction
  2. Les principes concurrentiels du système bancaire ouvert
  3. Conception réglementaire d'un système bancaire ouvert propice à la concurrence
  4. Conclusion

I. Introduction

  1. Le Bureau de la concurrence (Bureau), en qualité d'expert canadien en la matière, aide les décideurs du gouvernement à promouvoir la concurrence dans toute l'économie du paysNote de bas de page 1,Note de bas de page 2. Alors que le Comité consultatif sur le système bancaire ouvert (Comité consultatif) amorce la seconde phase des travaux de réflexion sur la mise en œuvre d'un système bancaire ouvert au CanadaNote de bas de page 3, le Bureau est heureux d'offrir son point de vue sur plusieurs thèmes pertinents et de les analyser afin de soutenir la conception réglementaire d'un système bancaire ouvert concurrentiel et innovant.
  2. Un système bancaire ouvert accroît la concurrence sur le marché des services financiers canadiens. Permettre aux clients d'envoyer leurs données de façon sécuritaire d'un établissement financier à un autre les aide à opter pour le fournisseur ou le produit qui répond le mieux à leurs besoins. Encourager ce comportement prompt au changement augmente la pression concurrentielle que subissent les établissements titulaires, et favorise les modèles d'affaires des fournisseurs de services nouveaux et innovants. Accroître la concurrence sur le marché canadien des services financiers élargira considérablement le choix, fera baisser les prix, augmentera la commodité et les niveaux d'innovation d'une industrie dont l'importance est capitale pour l'économie du CanadaNote de bas de page 4.
  3. Dans le présent mémoire, le Bureau énonce les avantages concurrentiels d'un système bancaire ouvert, et fournit des conseils sur les mesures de contrôle et de supervision visant à assurer le succès de ce système au Canada. Il y expose également des points favorables à une conception réglementaire propice à la concurrence qui garantira qu'un système bancaire ouvert encouragera efficacement la concurrence et l'innovation au profit des entreprises et des consommateurs de tout le pays.

II. Les principes concurrentiels du système bancaire ouvert

  1. Une réglementation efficace s'accompagne d'une bonne compréhension des objectifs de la politique qu'elle souhaite atteindre. Toutefois, au-delà des objectifs explicites, les décideurs devraient également tenter de comprendre les éventuelles conséquences plus larges d'un projet réglementaire. Un point essentiel pour tous les organismes de réglementation consiste à veiller à ce que cette dernière favorise la concurrence et l'innovation au sein de l'économie canadienneNote de bas de page 5.

Un système bancaire ouvert favorise la concurrence et l'innovation

  1. Le secteur canadien des services financiers se caractérise par d'importants obstacles pour y entrerNote de bas de page 6. Ces derniers vont à l'encontre des forces commerciales, ce qui complique la tâche aux entreprises qui souhaitent proposer de nouveaux produits, élargir leur offre actuelle ou prendre de l'expansion dans de nouveaux territoires. Ainsi, ces obstacles accroissent la stagnation des marchés : les clients disposent de choix moins nombreux, les services sont plus coûteux et les entreprises ont moins de raisons d'innoverNote de bas de page 7.
  2. Un système bancaire ouvert aidera les fournisseurs de services financiers à surmonter au moins quelques-uns de ces obstacles. Par exemple, dans son rapport de 2017, « L'innovation axée sur les technologies dans le secteur canadien des services financiers : une étude de marché », le Bureau reconnaît que les marchés financiers se caractérisent par un manque généralisé de clients qui changent de fournisseursNote de bas de page 8. Un système bancaire ouvert vise à inciter les clients à changer de fournisseurs de services en leur permettant de comparer plus facilement les offres des divers fournisseurs et, lorsqu'ils le décident, d'emporter avec eux leur historique de transactions et autres renseignements pertinents.
  3. En réduisant les obstacles à l'entrée dans le secteur des services financiers canadiens, un système bancaire ouvert peut accroître la dynamique concurrentielle qui y règneNote de bas de page 9. Lorsque les clients peuvent changer de fournisseurs plus aisément, il leur est aussi plus facile de faire jouer la concurrence, incitant ainsi les entreprises à commercialiser de nouvelles offresNote de bas de page 10. Une plus grande facilité à changer de fournisseur de services dynamise la concurrence entre ces derniers, et encourage l'apparition et l'essor de fournisseurs nouveaux et innovants, ce qui permet aux clients de tirer avantage de possibilités supplémentaires, de prix plus bas et de niveaux d'innovation accrus.
  4. Un système bancaire ouvert efficace offrira d'importants avantages économiques au Canada. Toutefois, s'il ne parvient pas à engendrer des occasions réalistes d'accroître la concurrence et l'innovation, les Canadiens risquent de perdre les avantages promis par un tel système, ainsi que les progrès réalisés par les nouveaux fournisseurs misant sur la technologie ces dernières années au CanadaNote de bas de page 11.

III. Conception réglementaire d'un système bancaire ouvert propice à la concurrence

  1. La réussite d'un système bancaire ouvert repose nécessairement sur une conception soignée et un soutien réglementaire continu. Ainsi, les décideurs se doivent de veiller activement à ce que les mesures réglementaires permettent d'atteindre leurs objectifs en matière de politique. Cette partie du mémoire du Bureau cerne les domaines auxquels il faudra porter une attention particulière pour concevoir le système bancaire ouvert canadien, et fournit des conseils pratiques sur la manière dont les règles de ce système peuvent favoriser au mieux la concurrence et l'innovation.

Principes universels d'une conception réglementaire favorisant la concurrence

  1. Le rapport de 2017 du Bureau, « L'innovation axée sur les technologies dans le secteur canadien des services financiers : une étude de marché », formule diverses recommandations dont les décideurs devront tenir compte pour élaborer des cadres réglementaires propices à la concurrence au sein du secteur financierNote de bas de page 12. Six de ces recommandations visent directement la conception d'un système bancaire ouvert au Canada.
  2. Toute réglementation devrait plus particulièrement être :
    1. Neutre sur le plan de la technologie et du mode de prestation : la réglementation devrait être suffisamment souple pour accueillir et favoriser les technologies nouvelles ou à venir.
    2. Fondée sur des principes plutôt que des prescriptions : la réglementation devrait viser un objectif stratégique et, dans la mesure du possible, ne pas préciser ou approuver une façon particulière de l'atteindre.
    3. Fondée sur la fonction d'une entité : les fournisseurs de services devraient se concurrencer sur un pied d'égalité. Dans la mesure du possible, les consommateurs d'un produit donné devraient bénéficier des mêmes mesures de protection, peu importe le modèle d'affaires du fournisseur.
    4. Proportionnelle au risque : la supervision et le contrôle réglementaires devraient reposer sur le risque que présente une activité pour le système financier.
    5. Harmonisée entre les territoires de compétence : harmoniser la réglementation entre les territoires de compétence permet aux entreprises d'entrer sur le marché et de faire affaire au-delà des frontières plus facilement.
    6. Examinée fréquemment : la réglementation devrait être examinée régulièrement pour s'assurer qu'elle atteigne les objectifs stratégiques et réponde de façon appropriée à l'évolution du marché.
  3. Ces principes s'appliquent à chaque élément de la conception d'un système bancaire ouvert. Les décideurs devraient évaluer la manière dont chaque élément réglementaire répond à ces principes et les soutient, puis adapter ces éléments s'ils omettent de le faire.
  4. Outre ces principes généraux visant une conception réglementaire propice à la concurrence, la réglementation d'un système bancaire ouvert compte cinq domaines qui méritent une attention particulière pour s'assurer que le système du Canada appuie au plus haut point la concurrence et l'innovation. Pour atteindre au mieux cet objectif, il convient de porter une attention particulière aux domaines suivants :
    1. l'établissement de normes liées aux API;
    2. les conditions d'accréditation des participants au système bancaire ouvert;
    3. le traitement de la responsabilité en cas d'atteinte à la sécurité ou de violation de la confidentialité;
    4. la garantie d'un accès réciproque aux données;
    5. des méthodes de recours lorsque le système exige une intervention réglementaire.

Établissement de normes liées aux API

  1. Comme le reconnaît le Comité consultatif dans son rapport de janvier 2020, les interfaces de programmation des applications (API) sont les « tuyaux » qui servent à échanger de l'information entre les fournisseurs de services financiersNote de bas de page 13. Ainsi, les normes liées aux API devraient être conçues afin d'encourager sciemment la concurrence que le système bancaire ouvert doit permettre.
  2. Deux approches extrêmes peuvent être adoptées concernant l'établissement de normes liées aux API. Dans l'une d'elles, un organisme de réglementation définit une norme universelle concernant l'échange de renseignements qui s'appliquerait aux participants d'un système bancaire ouvert (norme commune). Cette approche est celle qu'ont adoptée le Royaume-Uni (R.-U.)Note de bas de page 14 et l'AustralieNote de bas de page 15. Une seconde approche permet de faire varier les normes liées aux API entre les fournisseurs de services (norme individuelle). Cette approche est celle retenue au JaponNote de bas de page 16 et en EuropeNote de bas de page 17.
  3. Par analogie avec la communication orale, une norme commune exige que le système de chaque fournisseur de services utilise la même langue, alors qu'une norme individuelle permet que chaque système utilise un langage unique. Dans les deux cas, les mêmes renseignements sont transmis, mais la norme individuelle implique certains travaux de traductionNote de bas de page 18. À cet égard, les normes liées aux API mettent l'accent sur les objectifs importants de compatibilité et d'interopérabilité des systèmes.
  4. Une norme commune facilite plus directement l'apparition de fournisseurs de services financiers non titulaires concurrents (fournisseurs concurrents). Dans le cadre d'une norme commune, un fournisseur concurrent aurait seulement besoin d'élaborer une solution qui prend en charge des renseignements conformes à cette norme. Dans le cadre d'une norme individuelle, ce même fournisseur concurrent aurait à surmonter la complexité de traduire les renseignements du format de l'API de l'expéditeur dans le format des données de son système. Par ailleurs, le fait de devoir ensuite adapter ces systèmes chaque fois qu'un fournisseur de services modifie la norme de son API augmente encore la complexité. Dans ce sens, une norme commune permet aux fournisseurs concurrents de réduire le temps, le coût, les efforts et la complexité, ce qui simplifie leur étude de rentabilité pour faire face à leurs concurrentsNote de bas de page 19,Note de bas de page 20.
  5. Cela dit, une norme commune peut nuire à l'innovation et au dynamisme de la concurrence lorsque de nouvelles normes émergent. Par définition, des normes communes sont rigides et s'en écarter, même dans des circonstances où cela pourrait être avantageux, pourrait nécessiter un certain nombre d'ententes bilatérales entre les fournisseurs de services financiers afin d'agir en dehors d'une norme commune prédéfinieNote de bas de page 21,Note de bas de page 22. Cela crée un manque de flexibilité susceptible de réduire les mesures incitatives offertes aux fournisseurs de services pour qu'ils offrent des méthodes innovantes d'échanger des données, au détriment d'une concurrence dynamiqueNote de bas de page 23 ,Note de bas de page 24.
  6. Une approche intermédiaire peut être plus favorable, tant pour la concurrence immédiate que pour l'adaptabilité de la concurrence à l'avenir. Une norme commune, qui établit les champs de données obligatoires, les spécifications de rendement et les documents techniques, facilite plus habilement la concurrence dans le secteur des services financiers en aval dans l'immédiatNote de bas de page 25. Cependant, toute adoption de normes communes devrait uniquement avoir lieu en misant sur la flexibilité comme objectif clé en vue d'offrir des cas d'utilisation nouveaux et novateursNote de bas de page 26. Au bout du compte, un système bien conçu favorisera l'apparition rapide de fournisseurs concurrents aujourd'hui, tout en offrant une souplesse suffisante au processus concurrentiel dynamique, de sorte qu'un système de normes communes puisse s'adapter aux précieuses innovations à venirNote de bas de page 27.

Conditions d'accréditation

  1. Un système bancaire ouvert exige que les fournisseurs de services s'échangent les renseignements financiers des clients, et la transmission de ces renseignements pose des problèmes évidents de protection des données et de confidentialité. Afin de protéger ces renseignements, il se peut qu'il faille que les fournisseurs de services d'un système bancaire ouvert soient « accrédités » – c'est-à-dire, que chacun d'eux soit tenu de démontrer que son système est suffisamment robuste et qu'il a mis en place des mesures de conformité adéquate pour minimiser les risques liés à la transmission des données.
  2. L'accréditation se fait habituellement par l'entremise d'un organe d'accréditation centralisé. Un tel organe d'accréditation examine les systèmes et les processus opérationnels des fournisseurs de services, et approuve la participation de ces derniers au système bancaire ouvert. Le R.-U., l'Union européenneNote de bas de page 28, le JaponNote de bas de page 29 et l'AustralieNote de bas de page 30 ont tous adopté une forme ou une autre d'accréditation centraliséeNote de bas de page 31.
  3. Les conditions d'accréditation doivent être minutieusement élaborées afin de favoriser la concurrence et l'innovation. Des conditions trop strictes pourraient limiter la capacité des fournisseurs concurrents à entrer sur le marché et à livrer concurrence en leur faisant porter un fardeau réglementaire considérable ou en établissant des exigences réglementaires incompatibles avec leur modèle d'affairesNote de bas de page 32.
  4. En outre, la composition de tout organe d'accréditation est importante pour la concurrence. Les organes d'accréditation, dans leur rôle d'approbation des participants du système bancaire ouvert, peuvent exercer un contrôle important sur les résultats des marchés. Par exemple, dans le cas d'abus de position dominante reproché par le Bureau à Interac, divers fournisseurs de services financiers canadiens ont promulgué, par le truchement d'un contrôle commun du système Interac, des règles qui ont eu pour conséquence d'empêcher d'autres fournisseurs de services d'accéder au réseau Interac, aux dépens de la concurrence et de l'innovationNote de bas de page 33. Pour éviter un comportement similaire dans le contexte d'un système bancaire ouvert, les organes d'accréditation devraient être indépendants, et aucune partie ni aucun groupe de parties ayant un intérêt dans les résultats commerciaux d'une décision d'accréditation ne devrait pouvoir accorder ou refuser l'accréditation unilatéralement.
  5. Enfin, pour favoriser la concurrence, un organe d'accréditation peut souhaiter utiliser une forme d'accréditation provisoire ou par paliers. Une telle approche pourrait fournir un certain niveau d'accréditation conditionnelle ou préliminaire aux fournisseurs concurrents, leur permettant d'entrer dans le système plus tôt au cours du cycle de développement de leurs produits. Cela offrirait aux fournisseurs concurrents la souplesse nécessaire pour atteindre les objectifs d'accréditation au fur et à mesure de l'élaboration de leur cas d'utilisation.
  6. Dans un système bancaire ouvert, l'accréditation joue un rôle de contrôle primordial. Bien qu'il soit important de s'assurer que les participants d'un système bancaire ouvert sont crédibles, fiables et dignes de foi, ce rôle de contrôle doit aussi être conçu soigneusement pour veiller à ce qu'il soutienne la concurrence et l'innovation.

Traitement de la responsabilité

  1. Étant donné que le système bancaire ouvert nécessite d'échanger des renseignements financiers sensibles de clients, la question qui se pose est celle de la défense des clients en cas d'atteinte à la sécurité ou de violation de la confidentialitéNote de bas de page 34. Quelle que soit la partie – l'expéditeur ou le destinataire – qui est finalement responsable, deux approches principales permettent de s'assurer que les clients seront dédommagés pour les éventuelles pertes occasionnées. D'abord, les fournisseurs de services pourraient être tenus de disposer de soldes de capitaux qui serviraient à couvrir les pertes liées à une atteinte à la sécurité. Ensuite, on pourrait leur demander de posséder une assurance contre de telles pertes.
  2. Dans les deux cas, ces exigences doivent être soigneusement conçues pour éviter les conséquences néfastes sur la concurrence et l'innovation. Si de nouveaux concurrents potentiels se heurtent à des exigences de capital élevé pour participer à un système bancaire ouvert, cela entravera leur entrée sur le marché, pourrait freiner l'innovation et nuire à la concurrenceNote de bas de page 35. Si disposer d'une assurance devient obligatoire, alors les organismes de réglementation doivent d'abord s'assurer qu'il existe un marché de l'assurance adéquat, et soigneusement tenir compte du rôle des grands établissements financiers sur le marché de la souscription. Par exemple, si les titulaires souscrivent les polices d'assurance des fournisseurs concurrents, ils pourraient être en mesure et être tentés d'augmenter les primes pour limiter l'entrée de nouveaux concurrentsNote de bas de page 36.
  3. Au bout du compte, les mesures de protection liées à la responsabilité devraient être mises en œuvre de façon à minimiser toute conséquence néfaste sur la concurrence et l'innovation. Les décideurs peuvent appuyer cet objectif en s'assurant que les règles en matière de responsabilité sont élaborées de manière à encourager l'entrée de concurrents sur le marché et à ouvrir le jeu au plus de services concurrentiels possible.

Réciprocité de l'accès aux données

  1. La réciprocité de l'accès aux données est le concept qui permet la circulation des renseignements financiers entre tous les participants du système bancaire ouvert. Elle peut accroître la concurrence entre les fournisseurs de services et offrir des mesures incitatives pour qu'un plus grand nombre d'entreprises participe au système bancaire ouvertNote de bas de page 37,Note de bas de page 38.
  2. La clé d'un système de réciprocité efficace réside en une définition appropriée des données « exclusives » et « non exclusives ». Dans ce contexte, un système bancaire ouvert nécessite d'utiliser des données non exclusives que s'échangeront les fournisseurs de services, ce qu'ils ne feront pas avec des données exclusives.
  3. Une distinction appropriée entre des données exclusives et non exclusives doit équilibrer l'innovation et la concurrence. La capacité à désigner certains renseignements comme étant exclusifs est essentielle pour inciter les fournisseurs de services à investir dans des produits innovants; sans une telle mesure de protection, les fournisseurs de services concurrents pourraient profiter injustement de cette innovationNote de bas de page 39. Toutefois, désigner indûment des données comme étant exclusives peut permettre d'occulter des renseignements nécessaires à des rivaux, entravant leur capacité à utiliser les données des clients pour offrir des produits financiers compétitifs.
  4. Il peut donc incomber aux organismes de réglementation de faire une distinction claire entre les données exclusives et non exclusives qui soit suffisamment souple pour servir dans de nombreux cas d'utilisation potentiels. L'expérience du Bureau, notamment dans le cas d'abus de position dominante reproché au Toronto Real Estate Board (TREB), est que les entreprises pourraient alléguer illégitimement que certaines données sont exclusives en vue de nuire au processus concurrentielNote de bas de page 40. Aussi, les organismes de réglementation devraient s'assurer qu'il existe des preuves matérielles pour légitimer les allégations visant à ne pas échanger certaines données.

Méthodes de recours

  1. Même la mieux conçue des réglementations est remise en question par des circonstances imprévues. Par exemple, une mesure réglementaire peut omettre de tenir compte d'une nouvelle technologie, ou un critère d'accréditation peut se révéler inapproprié pour une certaine catégorie de nouveaux fournisseurs. Il est, par conséquent, crucial de mettre en place un système de recours efficace pour résoudre les problèmes à mesure qu'ils surviennent. Omettre de le faire peut retarder ou annuler les avantages de la concurrence.
  2. Il existe de nombreux modèles de recours efficace. L'un d'eux consisterait à disposer d'un organe réglementaire habilité à écouter et à résoudre les différends. Une autre solution pourrait consister à laisser décider un comité d'experts, reconnaissant que certaines questions peuvent nécessiter une expertise technique important pour être résolue. D'un point de vue concurrentiel, comme pour la discussion sur les organes d'accréditation ci-dessus, tout organe de recours devrait être indépendant, et aucune partie ni aucun groupe de parties ayant un intérêt dans les résultats commerciaux d'une décision de recours ne devrait pouvoir prendre unilatéralement cette décision.
  3. Un modèle de recours qui vaudrait peut-être la peine d'étudier plus avant est celui utilisé par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) pour régir son Comité directeur sur l'interconnexion (CDCI)Note de bas de page 41. Ce comité donne les moyens à des groupes de travail de participants de l'industrie de discuter et de tenir compte de problèmes techniques et opérationnels complexes dans les domaines réglementés du secteur des télécommunications au Canada. Ces groupes de travail suivent des lignes directrices administratives établies par le CRTCNote de bas de page 42 et remettent des rapports sur des questions actuelles au CRTC pour qu'il prenne une décision à leur égard. Ce modèle permet aux personnes qui seront probablement les plus touchées par une décision réglementaire donnée de jouer un rôle central dans le processus décisionnel.

IV. Conclusion

  1. Un système bancaire ouvert efficace augmentera la concurrence et l'innovation en plaçant une pression concurrentielle accrue sur les titulaires, tout en soutenant les modèles d'affaires de fournisseurs de services nouveaux et innovants. Une concurrence accrue dans l'industrie des services financiers canadiens conduira à un éventail plus large de produits financiers novateurs, proposés à des prix plus bas, ce qui profitera aux entreprises et aux consommateurs.
  2. Pour encourager la mise sur pied d'un système bancaire ouvert au Canada, qui favorise la concurrence et l'innovation, le Bureau recommande ce qui suit :
    1. que les décideurs évaluent chaque élément des régimes proposés de système bancaire ouvert par rapport aux principes de conception réglementaires propices à la concurrence énoncés dans le présent mémoire;
    2. que les API utilisées pour faciliter l'échange de données entre les fournisseurs de services soient normalisées afin de réduire les obstacles à l'entrée sur le marché, mais qu'un processus soit adopté pour permettre l'émergence de nouvelles normes au besoin;
    3. que les décisions en matière d'accréditation soient prises par un organe indépendant de façon à ce qu'aucune partie ou qu'aucun groupe de parties ayant un intérêt dans les résultats commerciaux d'une décision d'accréditation ne puisse accorder l'accréditation unilatéralement;
    4. que les exigences en matière de responsabilité soient bien vérifiées pour qu'elles ne créent pas d'obstacle superflu ni ne reposent sur des marchés de l'assurance inexistants ou sous-développés;
    5. que l'accès aux données soit régi par le principe de réciprocité, et que les prétentions des fournisseurs de services quant à l'exclusivité et l'incommunicabilité de certains renseignements soient étayées par des preuves;
    6. qu'un mécanisme de recours efficace soit mis en place pour assurer l'adaptabilité du système bancaire ouvert.
  3. Le Bureau est heureux de l'occasion qui lui est offerte de soutenir le travail de réflexion du Comité consultatif sur la mise en œuvre d'un système bancaire ouvert au Canada. À cet égard, le Bureau se tient à sa disposition pour discuter du présent mémoire ou pour tenir compte d'autres questions sur lesquelles le Comité consultatif pourrait souhaiter recevoir d'autres mémoires.