Guide des modifications apportées en 2022 à la Loi sur la concurrence

Le 24 juin 2022

D’importantes modifications à la Loi sur la concurrence sont entrées en vigueur le 23 juin 2022. Le présent guide donne un aperçu des plus importantes modifications apportées à la loi dans les domaines des amendes et des sanctions, de la collusion commerciale, de l’indication de prix partiel, de l’abus de position dominante, de l’examen des fusions et de la collecte d’éléments de preuve au cours d’enquêtes.

Le guide n’est pas un document juridique et ne remplace pas les avis juridiques. Le Bureau de la concurrence révisera et mettra à jour ses lignes directrices en matière d’application de la loi afin d’assurer la transparence et la prévisibilité pour les membres du milieu des affaires et du milieu juridique.

Sur cette page :

Introduction

Le gouvernement du Canada a apporté des modifications à la Loi sur la concurrence en 2022, à titre d’étape préliminaire de la modernisation du régime de concurrence canadien. Les modifications corrigent certaines failles dans la loi, s’attaquent aux pratiques commerciales nuisibles aux travailleurs et aux consommateurs, augmentent les sanctions et l’accès à la justice, et adaptent la loi à la réalité numérique d’aujourd’hui.

Augmentation des amendes et sanctions

Les amendes et les sanctions administratives pécuniaires jouent un rôle important pour assurer la conformité à la Loi sur la concurrence en incitant financièrement les entreprises à se conformer à la loi.

  • En ce qui concerne les accords criminels entre concurrents visant à fixer les prix, à restreindre l’approvisionnement ou à attribuer les marchés (selon l’article 45), la limite de 25 millions de dollars pour les amendes sera éliminée et les montants d’amende seront établis par le tribunal (paragraphe 45(2)).
    • Cette disposition n’entrera pas en vigueur avant le 23 juin 2023.
  • Les limites imposées aux sanctions administratives pécuniaires civiles, qui sont applicables aux pratiques commerciales trompeuses (sous-alinéas 74.1(1)c)(i) et (ii)) et à l’abus de position dominante (paragraphe 79(3.1)), ont augmenté.
  • Pour les dispositions relatives aux pratiques commerciales trompeuses :
    • La nouvelle sanction maximale pour les personnes physiques correspond au plus élevé des montants suivants :
      • 750 000 $ (un million de dollars pour chaque violation subséquente);
      • trois fois la valeur du bénéfice tiré du comportement trompeur, si ce montant peut être déterminé raisonnablement.
    • Auparavant, les sanctions pour les personnes physiques étaient plafonnées à 750 000 $ (un million de dollars pour chaque infraction subséquente).
    • La nouvelle sanction maximale pour les personnes morales correspond au plus élevé des montants suivants :
      • 10 millions de dollars (15 millions de dollars pour chaque violation subséquente);
      • trois fois la valeur du bénéfice tiré du comportement trompeur. Si ce montant ne peut être déterminé raisonnablement, la sanction maximale correspondra à 3 % des recettes globales brutes annuelles.
    • Auparavant, les sanctions pour les personnes morales étaient plafonnées à 10 millions de dollars (15 millions de dollars pour chaque violation subséquente).
  • En ce qui concerne les dispositions sur l’abus de position dominante
    • La nouvelle sanction maximale correspond au plus élevé des montants suivants :
      • 10 millions de dollars (15 millions de dollars pour les violations subséquentes);
      • trois fois la valeur du bénéfice tiré du comportement trompeur. Si ce montant ne peut être déterminé raisonnablement, la sanction maximale correspondra à 3 % des recettes globales brutes annuelles.
    • Auparavant, les sanctions étaient plafonnées à 10 millions de dollars (15 millions de dollars pour chaque violation subséquente).

Les accords de fixation des salaires et de non-débauchage seront interdits sur le plan criminel

Il s’agit d’une nouvelle disposition qui s’inscrit dans les dispositions de la Loi sur la concurrence relatives aux complots criminels afin de protéger les travailleurs contre les accords entre employeurs qui fixent les salaires et limitent la mobilité professionnelle (paragraphe 45(1.1)).

  • Les modifications érigeront en infraction le fait pour les employeurs de convenir de fixer, de maintenir, de réduire ou de contrôler les salaires ou d’autres conditions d’emploi (« accords de fixation des salaires ») et de s’abstenir d’embaucher ou d’essayer d’embaucher des employés de l’autre (« accords de non-débauchage »). La sanction imposée en cas de violation de cette disposition comprend une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à quatorze ans ou une amende qui doit être fixée à la discrétion du tribunal, ou les deux.
  • Cette disposition n’entrera pas en vigueur avant le 23 juin 2023.

L’indication de prix partiel est explicitement reconnue comme une pratique commerciale préjudiciable

Les modifications ajoutent une nouvelle disposition concernant l’indication de prix partiel à l’interdiction civile et pénale des indications fausses ou trompeuses (articles 52 et 74.01). Il y a indication de prix partiel quand un produit ou un service est affiché à un prix inatteignable parce que les consommateurs doivent également payer des frais supplémentaires non imposés par le gouvernement pour acheter le produit ou le service.

Le commissaire a pris avec succès des mesures d’application de la loi contre cette pratique en recourant à la disposition générale sur les indications fausses ou trompeuses de la Loi sur la concurrence (article 74.01).

  • Les modifications confirment que le fait d’indiquer un prix qu’un client ne peut pas atteindre parce qu’il y a des frais supplémentaires fixes obligatoires est une indication fausse ou trompeuse (paragraphes 52(1.3) et 74.01(1.1)).
    • Cela ne s’applique pas aux frais qui sont entièrement imposés par le gouvernement (comme la taxe de vente).

Liste élargie des facteurs permettant de déterminer l’incidence sur la concurrence

La Loi sur la concurrence contient des listes de facteurs à prendre en compte afin d’évaluer l’incidence des fusions, des pratiques commerciales et des collaborations avec les concurrents sur la concurrence (paragraphes 79(4) et 90.1(2), et article 93). Ces listes non exhaustives ont été élargies afin de comprendre certains facteurs qui peuvent survenir dans le commerce numérique, mais elles s’appliquent plus largement également.

  • En ce qui a trait aux fusions et aux collaborations entre concurrents, les facteurs ont été mis à jour pour comprendre :
    • les effets de réseau comme un autre exemple d’entrave à l’accès à un marché;
    • l’ancrage possible de la position de marché des principaux titulaires;
    • les effets sur la concurrence par les prix et sur la concurrence hors prix, comme la qualité, le choix ou la vie privée des consommateurs.
  • En ce qui a trait à l’abus de position dominante, les facteurs ont été mis à jour pour comprendre :
    • les effets sur les entraves à l’accès au marché, tels que les effets de réseau;
    • les effets sur la concurrence par les prix et sur la concurrence hors prix, comme la qualité, le choix ou la vie privée des consommateurs;
    • la nature et la portée des changements et des innovations dans le marché pertinent;
    • tout autre facteur qui est relatif à la concurrence dans le marché et qui est ou serait touché par la pratique.

Clarification du cadre d’application de la loi en ce qui a trait à l’abus de position dominante

Les modifications clarifient la définition d’« agissement anticoncurrentiel » pour l’abus de position dominante (paragraphe 78(1)).

  • La Loi sur la concurrence définit maintenant un agissement anticoncurrentiel comme un agissement destiné à avoir un effet négatif visant l’exclusion, l’éviction ou la mise au pas d’un concurrent, ou à nuire à la concurrence.

La Loi sur la concurrence contient une liste non exhaustive d’exemples de pratiques commerciales qui peuvent être considérées comme un abus de position dominante.

  • Les modifications ajoutent un nouvel exemple à la liste : une réponse sélective ou discriminatoire de la part d’un acteur dominant afin qu’il soit plus difficile pour un concurrent d’entrer sur un marché ou de croître, ou afin d’éliminer un concurrent d’un marché.

Accès privé au Tribunal de la concurrence pour les affaires d’abus de position dominante

L’accès privé permet aux parties privées de présenter une demande directement au Tribunal de la concurrence si elles sont directement et sensiblement touchées par le comportement d’une autre partie. Un accès privé est déjà offert pour certaines dispositions de la Loi sur la concurrence.

  • Les modifications étendent l’accès privé aux cas d’abus de position dominante (paragraphe 103.1(1)).
    • Les personnes qui cherchent à obtenir un accès privé doivent toujours obtenir une autorisation du Tribunal selon la norme juridique en vigueur.

Pouvoirs étendus de collecte d’éléments de preuve

  • Les modifications précisent clairement qu’une personne doit fournir des renseignements en vertu d’une ordonnance judiciaire obtenue par le Bureau si elle exploite une entreprise au Canada ou vend des produits en direction du Canada, même si elle est située à l’étranger (paragraphe 11(5)).
  • Les modifications ajoutent également un nouveau pouvoir pour obliger les sociétés affiliées étrangères et nationales à fournir des renseignements écrits.
    • Les circonstances dans lesquelles de telles ordonnances judiciaires peuvent être obtenues ont également été élargies afin de comprendre les cas où la société affiliée « a ou a vraisemblablement des documents ou des renseignements qui sont pertinents à l’enquête ». Auparavant, il était nécessaire de démontrer que la société affiliée « a des documents » qui sont pertinents à l’enquête (paragraphe 11(2)).

Lacunes corrigées dans les exigences relatives aux avis de fusion

Il s’agit d’une nouvelle disposition de la Loi sur la concurrence. Le commissaire doit être avisé des fusions qui atteignent certains seuils avant qu’elles ne soient complétées. Le commissaire examine ces transactions afin de déterminer si elles auront vraisemblablement pour effet de nuire à la concurrence.

  • Les modifications ajoutent une disposition pour s’assurer que les exigences obligatoires relatives aux avis de fusion s’appliqueront aux transactions qui ont été conçues dans le but d’éviter la présentation d’un tel avis (article 113.1).

Précisions sur le processus d’examen des fusions

  • Les modifications apportent des précisions sur le calendrier, y compris les jours fériés pour le calcul des périodes d’attente en vertu de la Loi sur la concurrence (paragraphe 108(3)). Les samedis, dimanches, autres jours fériés et jours de semaine qui suivent des jours fériés qui tombent un jour de fin de semaine sont considérés comme des jours fériés aux fins du calcul des périodes d’attente.
  • Les modifications confirment également les heures d’ouverture pour la production de renseignements (paragraphe 108(4)). Les renseignements reçus après 17 h HE seront réputés avoir été reçus le jour non férié suivant.